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12 mai 2015 2 12 /05 /mai /2015 11:39
Auteur anonyme
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De cet homme, l’on ne peut reprocher que son fort-penchant pour la liberté des noirs. Avec le temps, on aura tendance à dire qu’il ne devait pas trop se fier à Leclerc, qui a fini par l’arrêter et l’embarquer pour la France – pour calmer la grande panique de Napoléon Bonaparte qui ne voulait pas voir la plus riche colonie française des Amériques filer entre ses doigts –. Toussaint Louverture, le premier des noirs, le gouverneur de Saint Domingue, fait souvent objet de critique pour une supposée allégeance à la métropole Française. A mon avis, il n’a jamais eu l’intention de se soumettre à une quelconque métropole. Malheureusement, les racines du colbertisme, oscillées jusque dans le Bonapartisme, ne lui ont pas permis de prouver ses bonnes intentions en atteingnant le pavillon de la liberté. Toussaint est l’homme de la modernité. Des négociations. La proclamation de la constitution de 1801 n’était pas des moindre. Il était écrit que Saint Domingue, dans toute son étendue, fait partie de l’empire Français, mais il était aussi souligné à l’encre forte qu’elle était soumis à des lois particulières.

Proclamer une constitution, dire que cette colonie sera dirigée par ses propres lois et abolir l’esclave, les contradictions d’avec la métropole étaient criantes. Il fallait faire taire ce petit nègre, s’autoproclamant gouverneur général de St-Domingue et dépositaire de tous les droits de désigner son successeur.

Le titre de gouverneur, il l’avait gagné sur les champs de bataille, en vainquant, en 1794, les espagnols et les refouler à la partie orientale de l’ile. Il s’est aussi combattu courageusement contre les britanniques, dans le Nord et dans l’Ouest. Il convient de rappeler que Toussaint, ainsi que ses frères esclaves, s’est allié à ces mêmes espagnols dans l’unique but de combattre la France esclavagiste. Après la proclamation de Sonthonax, et vivant le peu d’engouement de ses alliés de la partie orientale, il a décidé son célèbre revirement. Très calculateur, le mythique Toussaint n’avait qu’un seul objectif, diriger l’ile tout seul. Le retour de Sonthonax comme commissaire civil en mai 1796 lui constitua une ombre. Sa tactique lui a valu de se débarrasser de cette embuche, en faisant élire, en septembre 1796, Lavaux et Sonthonax comme député auprès du directoire. Le Spartacus noir, celui qui voulait l’émancipation de sa race, celui qui faisait d’Haiti la terre de liberté de tous les nègres du monde entier, avait voulu trop en publiant les règlements du 12 octobre 1800, reconduisant le travail forcé des noirs sur les plantations. La règle était trop sévère, déshumanisant même. Mais il faudrait quand même penser à la prospérité de l’ile. Toussaint Louverture n’a jamais souhaité réduire ses frères à l’esclavage. L’article 3 de la constitution de 1801 peut en témoigner « Il ne peut exister d’esclaves sur ce territoire, la servitude y est à jamais abolie. Tous les hommes y naissent, vivent et meurent libres et Français ».

Contre cette tentative [trop facile] de dresser le libérateur Jean Jacques Dessalines contre le précurseur de l’indépendance Toussaint Louverture, il faut se rappeler que les œuvres des deux sont complémentaires dans le sillage d’une première révolution anticoloniale et anti-esclavagiste. Toussaint Louverture a inculqué cette soif de liberté, cette hargne contre l’oppression coloniale et ce désir de vengeance à Dessalines et à Christophe, ses deux lieutenants avec qui il a combattu Rigaud dans le sud. Sans un leadership transformationnel, la continuité de la lutte pour la liberté après sa déportation, ne saurait tenir. « En me renversant, on a abattu à St Domingue que le tronc de l’arbre de la liberté. Il [l’arbre (NDLR] repoussera par ses racines car elles sont profondes et nombreuses ». Une parole célèbre qui traduit la vision de l’homme, son leadership ainsi que ses aspirations. Opposer ces icones de la lutte pour la liberté, c’est bêtement jouer le jeu du néocolonialisme. Chez ceux qui présente Toussaint un citoyen français, un ancien gouverneur, il y a de l’hypocrisie. Il y a une tentative de récupération de ce que cet homme représente pour la race noire. Et dans ce jeu, il faut feindre d’occulter Jean Jacques Dessalines pour provoquer un rejet du Spartacus noir chez tous ceux qui voient les choses que dans le premier degré.

Toussaint Louverture et Jean Jacques Dessalines font partie des grandes vies qui ont marqué notre vie de peuple. Deux légendes qui nous donnent envie de grandir, rien qu’en entendant leur nom. Toussaint Louverture a commencé la lutte. Jean Jacques Dessalines a parachevé l’œuvre. Sans Toussaint, il n’y aurait pas de Dessalines.

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